Introduction
Religion de la toute-puissance de Dieu, l’islam pose l’acte même de croire ou de ne pas croire comme un dessein divin. Les nombreuses références coraniques en la matière sont sans équivoque : la liberté que Dieu octroie à sa créature trouve son corollaire dans la responsabilité qui en découle en termes de salut pour son âme. Au-delà de toute considération qui touche au vaste débat sur le bien et le mal, la volonté de Dieu et de l’homme ( libre-arbitre versus prédestination), dans la perspective islamique, être libre devant la volonté divine c’est se libérer des contraintes humaines serviles. L’obéissance et l’amour que le musulman délivre à Dieu à travers son adoration constitue une déclaration noble de liberté. il s’agit d’explorer ici la question d’autres formes d’adoration de Dieu, vue de l’angle de l’Islam. La réflexion exprimée ici s’appuie sur le fameux verset coranique :
« Si Dieu l’avait voulu, il aurait fait de vous une seule communauté. Mais il a voulu vous éprouver par le don qu’il vous a fait. Cherchez à vous surpasser les uns et les autres par les bonnes actions. Votre retour à tous se fera vers Dieu, il vous éclairera au sujet de vos différends » (Sourate 48-verset 5).
S’ouvrir à l’autre dans la fraternité, avec nos divergences….
Il convient de relire, au travers d’un prisme polysémique, ce texte central et de méditer son sens profond. Il nous revient enfin d’accepter la foi de l’autre, dans son altérité, comme un plan formé, dans un esprit similaire, par des lignes de force concurrentes, au sens actuel du terme, autant qu’à son sens étymologique. Ainsi, l’ouvrage édité par le Conseil International de la Langue Française, en 1991, sous le titre Chrétiens et musulmans, que croyons-nous ?, souligne-t-il la nécessité de ce faisceau qui témoigne simplement de l’indispensable vitalité du référent théologique, au cœur de l’homme. Dans un ouvrage antérieur intitulé Charles de Foucauld, au regard de l’Islam , Ali Merad nous indique des pistes possibles, entre les ergs des religions, lesquelles sont supposées consacrer ce lien originel entre l’Homme et Dieu [1].
Dans la perspective islamique, les différences entre les civilisations et entre les religions sont perçues et vécues comme les manifestations multiples d’un message essentiellement unique, qui a été adressé par Dieu à des peuples vivant dans des lieux et des temps différents.
La symbolique liée à l’ascension du Prophète de l’islam lors de son voyage nocturne, sa rencontre avec ses « frères » Abraham, Moïse et Jésus en est l’illustration même [2]. Les Textes Sacrés mettent en exergue la rencontre et l’échange entre les croyants, que ce soit au sein leur communauté ou dans leurs rapports avec les autres communautés traditionnelles et les hommes de manière générale. L’existence de communautés plurielles, chacune avec ses spécificités culturelles, linguistiques, anthropologiques et religieuses est explicitement actée dans le Livre Saint destiné à la guidance de l’humanité : « Ô hommes ! Nous vous avons créés d’un homme et d’une femme, et Nous vous avons établis en peuples et en tribus pour que vous appreniez à vous connaître. Le plus noble d’entre vous, aux yeux de Dieu, est le plus pieux. Et Dieu est Savant et bien Informé(Coran 49,13) ».
La connaissance de l’autre, le rapprochement entre les peuples, reflets dans ce monde du lien spirituel des hommes à Dieu, constituent le socle d’une coexistence pacifique naturelle, synonyme d’unité dans la diversité ; ils impliquent, en outre, la reconnaissance et le respect des différences voulues et harmonieusement ordonnées par la sagesse divine. Le verset mentionné en prélude est lui-même précédé par l’affirmation divine que chaque communauté a reçu sa « loi » et sa « voie » [3] en son temps.
Contrairement à certaines interprétations déviées, parfois instrumentalisantes, qui viennent conforter les postulats huntingtoniens, les différences entre les religions et entre les civilisations ne sauraient avoir pour conséquence une lutte effrénée et sans merci pour la victoire de sa propre cause. Il s’agit bien plutôt, selon le Coran, de « rivaliser dans les bonnes actions », de s’ouvrir, sans hostilité ni présomption, à la discipline religieuse et à la tension spirituelle vers la connaissance et la réalisation commune du Bien suprême qui n’appartient à personne, de manière exclusive et absolue. La rencontre entre civilisations différentes porte en elle les possibilités d’une reconnaissance mutuelle non seulement de cette « bonté et piété des œuvres » mais surtout de l’Unique Bien, Dieu Lui-même, dans la mesure où les hommes sont appelés à honorer leur nature originelle, en apprenant à coexister et à coopérer dans l’intelligence et la grandeur de l’âme. Pour l’islam, les relations entre les hommes et entre les peuples reposent sur l’échange quotidien et une harmonie spirituelle qui trouvent leur épanouissement dans la satisfaction de Dieu, unique source de Connaissance. Dans l’esprit des idéologues des Lumières « l’homme est le terme unique duquel il faut partir et auquel il faut tout ramener » : l’islam est en adéquation avec cette formule si on remplace le terme « homme » par « Dieu ». Le retour vers le Créateur conformément au Mîthâq, cette alliance conclue de toute éternité entre Dieu et les hommes dans son acception la plus large, ne peut que se traduire par un retour en « bien » vers les créatures [4].
Le fidèle musulman est invité à porter le flambeau du « témoignage » conformément au dessein divin, dans la sincérité, la fraternité et la pondération : « C’est ainsi que Nous avons fait de vous une communauté médiane afin que vous soyez témoins pour les hommes et que l’Envoyé soit témoin pour vous » (Coran , 2,143). Dans la perspective islamique, le témoin ne peut se substituer au juge, rôle assumé du reste dans l’absolu par Dieu Lui-même, même si « la recommandation du bien et la condamnation du mal » dans leur acception globale demeurent deux principes fondamentaux de l’islam [5].
Un croyant, qu’il soit juif, chrétien, ou musulman, tire sa foi et son inspiration dans sa relation intime au Créateur, Lequel a offert à l’homme le don miraculeux de la vie, le souffle de l’Esprit qui guide les actions des créatures dans leurs responsabilités terrestres.
D’aucuns y verront à tort une contradiction avec le verset 3 de la sourate 5 [6]. A cet égard, il est vrai que l’islam se définit lui-même comme le parachèvement de la Révélation divine et qu’à ce titre son fondateur est le sceau de la prophétie quand le Coran est considéré un peu comme le dernier testament aux yeux des musulmans. La parabole de la dernière pierre posée à l’édifice, établie par la Sounna [7], souligne l’ouvrage commun de la tradition prophétique, sa source divine originelle et son aboutissement avec l’avènement de l’islam. Un autre propos attribué au Prophète est encore plus explicite : « Je suis celui qui est le plus digne du fils de Marie, en ce monde et dans l’au-delà, parce qu’il n’y a pas eu de prophète entre moi et lui. Les prophètes sont des frères …Leur mère est différente mais leur religion est unique [8] » . Dans cette relation chaleureuse et éminente entretenue avec tous les membres de la grande fratrie prophétique dispersés à travers les époques et les contrées, le Messie, on le voit, occupe une place de prédilection.
S’il est difficile, par ailleurs, de discerner dans quelle mesure le Prophète a eu connaissance de la doctrine du christianisme (surtout sous ses formes orientales) et par quelles voies (on cite souvent les noms de Salman le Persan, du moine syriaque Bahira, de Waraqa ben Nawfal), il est certain que le Coran fait preuve, en maints passages, d’une sympathie particulière pour les chrétiens, les « Nasara ». Ce lien privilégié avec le christianisme est attesté notamment dans la sourate 5 : « Ceux qui sont les plus disposés à sympathiser avec les musulmans sont les hommes qui disent : « Nous sommes des chrétiens. » Cela tient à ce que ces derniers ont parmi eux des prêtres et des moines et à ce qu’ils ne font pas montre d’orgueil. » (Coran, 5, 82).
L’islam quant à lui, considéré par ses adeptes comme la voie de la fitra [9], reconnait l’existence d’autres formes de sagesse divine notamment dans les religions monothéistes, judaïsme et christianisme en premier lieu. Cependant, il intègre la croyance en un Dieu transcendant, Vivant (al hayy) « plus près de l’homme que sa veine jugulaire » et « présent à ses côtés où qu’il soit » [10]. Il ne s’agit pas pour autant de nier les spécificités de chacune des religions révélées et encore moins d’effacer d’un trait les divergences profondes tant sur les plans dogmatique que rituel.
La Vérité versus vérités
Que ce soit sur la nature du Christ, sur la Trinité ou même le sens que le musulman donne au terme Allah ou Dieu, des lignes de fracture importantes persistent. Le Coran, à maintes reprises, dénonce avec virulence les Gens du Livre [11] qui se sont égarés du droit chemin, en dénaturant le message de leurs prophètes. Ainsi la Thora et l’Evangile (au singulier) ont été , dans une perspective coranique, l’objet de transformation par la main humaine au cours des siècles ; l’islam voue aux gémonies les « spoliateurs » de la Parole divine, lesquels n’ont pas assumé la charge du dépôt divin qui leur a été confié [12]. Pour autant, tels qu’ils ont été enseignés par Moïse et Jésus, ils gardent, pour le Musulman, toute leur autorité. En d’autres termes, la doctrine des Écritures pratiquées actuellement n’est pas à rejeter en bloc car le Coran est la Vérité qui confirme les révélations antérieures. A ce titre, nous ne devons pas nous étonner de relever des similitudes entre les trois religions monothéistes, sachant pertinemment bien que la Révélation est dans son essence UNE mais multiple dans ses manifestations. Dans leur authenticité, la Thora, l’Évangile ainsi que tous les messages prophétiques antérieurs font partie intégrante du patrimoine spirituel musulman. En outre, le message coranique, qui restera inaltéré jusqu’à l’avènement de l’Heure, vient en quelque sorte apporter la « touche finale » (à l’instar du peintre) au vaste tableau du dessein divin.
Sans rentrer dans un long débat théologique sur la Vérité (ou peut-être les vérités) la raison, la connaissance de Dieu et l’articulation de ces trois concepts fondamentaux du champ théologique, citons ici l’un des grands noms de la mystique islamique : « Les vérités consacrées par la raison ne sont pas les seules, il y en a d’autres auxquelles notre entendement est absolument incapable de parvenir. Force nous est de les accepter… et il n’y a rien de déraisonnable de supposer qu’au dessus de la sphère de la raison il y ait une autre sphère. Celle de la manifestation divine. Si nous en ignorons les lois et les droits il suffit que la raison puisse en admettre la possibilité … » C’est la connaissance de soi-même qui mène à la connaissance de Dieu le Très Haut. A ce sujet il a été dit « Qui se connaît soi-même connaît son Seigneur » et Allah dit « Nous leur montrerons nos signes à tous les horizons et en eux-mêmes, jusqu’à ce que la vérité éclate pour eux ». Eh quoi ! ne suffit-il pas que ton Seigneur soit le témoin de tout ? » [13]. Al-Ghazali, malgré ses attaques envers l’aristotélisme exagéré de certains philosophes musulmans, demeure l’un des plus grands penseurs dans les annales de l’historiographie islamique et n’a jamais rejeté la raison comme instrument complémentaire de recherche de la vérité. Même si dans les conceptions ghazaliennes la capacité de la Révélation , à orienter vers le vrai, est incomparable, et ne dépend pas d’un système de pensée, par-delà le caractère heureux du lien entre foi et raison.
Dans la conception immanentiste de la vérité, l’homme serait capable de trouver par lui-même et en lui-même ces sources de vérité puisqu’il n’y aurait pas de rupture entre l’ordre des pensées et l’ordre des choses et que l’homme recèle en lui une parcelle de divin. Cela fut exprimé dans l’Islam par Averroës disant « la Science de Dieu est la cause de toute chose » (Scientia dei est causa rerum).
En d’autres termes, le musulman reconnait l’existence de vérités éparses dans les autres religions voire philosophies tout en voyant dans Dieu Lui-même la manifestation de LA VERITE [14] par définition. A l’instar d’Ibn Rochd, Ibn Tofail [15] démontra que la raison et la foi sont non seulement compatibles, mais toutes deux naturelles, voire complémentaires : le raisonnement doit même être considéré comme religieusement obligatoire, pour ceux qui sont dotés de tels talents. Accéder à la vérité grâce à la foi ou la raison, par l’intellect ou le cœur ? A quelle voie le croyant doit-il accorder la priorité ? La controverse a traversé les siècles et les religions et a certainement encore de beaux jours devant elle.
Maisons de Dieu et adorations plurielles….
En outre, la communion avec le divin trouve sa place dans des lieux de culte autres que les mosquées comme l’atteste une fameuse référence coranique en la matière : « Si Dieu ne repoussait pas les gens les uns par les autres, des monastères seraient démolis, ainsi que des églises, des synagogues, et des mosquées où le nom de Dieu est beaucoup invoqué. Dieu soutient, certes, ceux qui soutiennent Sa religion. Dieu est assurément fort et puissant » (Sourate 22, verset 40) »
Ainsi monastères, mosquées, églises et synagogues sont autant de « maisons de Dieu » où l’invocation du Créateur par Sa créature, dans toute sa diversité, est actée en tant que dévotion au divin [16]. A cet égard, la Sira (histoire du Prophète) nous relate ce moment fort en symbole où une délégation d’évêques nestoriens de Najrân, reçue par le Prophète, célébra la fête des Rameaux en 628 dans la Mosquée de Médine à l’issue d’une longue discussion théologique, prélude à ce qu’aujourd’hui nous qualifierions de dialogue œcuménique.
Notons au passage que les religions ont un double visage : on peut en faire la chronique macabre à travers les péripéties humaines mais à condition de tracer aussi l’histoire de leurs réussites.
Dans le contexte international actuel, marqué par la diversité culturelle et la pluralité religieuse, le risque est grand de voir se transformer progressivement, au point de se confondre, la mondialisation en standardisation, le pluralisme en division, l’unité en uniformisation. Une telle confusion représenterait non seulement un appauvrissement évident du patrimoine spirituel, intellectuel, culturel et humain qui constitue la richesse réelle de l’humanité, mais également une dégradation préoccupante des échanges entre les peuples et entre les religions, jusqu’à conditionner négativement, par l’opposition de leurs différences exacerbées, les possibilités de reconnaissance mutuelle qui fonde toute coexistence pacifique.
En conclusion d’un ouvrage édifiant paru en 1986, le Père Lelong écrivait : « (…) on mesure la responsabilité que portent aujourd’hui les croyants, et en particulier les porte-parole des trois grandes familles spirituelles issues d’Abraham. Sauront-ils surmonter la tentation (et le péril) de l’orgueil confessionnel, pour élaborer ensemble un avenir meilleur ? Agiront-ils en fonction de cette vérité, qu’étant à la fois le Tout-Autre et le Tout-Proche, Dieu appelle chaque être humain à « agir en ce monde comme s’il devait y vivre toujours et à agir pour l’Autre monde comme s’il devait mourir demain » ? [17] : ses propos, un quart de siècle plus tard, gardent toute leur pertinence et leur acuité.
De l’islam à l’ihsan ou l’excellence….
Il est notoire que la religion islamique est structurée en 3 degrés : Le premier degré étant al-islam (attitude d’abandon à Dieu) puis en second lieu, al-imân (la foi profonde et sincère) et tout en haut de l’échelle, al-ihsân (l’excellence dans le bon-agir). C’est dans cet ordre qu’ils furent cités dans le célèbre hadith où l’ange Gabriel (Djibril) rend visite au Prophète et l’interpelle sur ces trois concepts ainsi que l’Apocalypse, dans une visée pédagogique [18]. Notons au passage que l’ihsân implique pour le croyant l’adoration de Dieu « comme s’il Le voyait, car si lui ne le voit pas, son Créateur le voit ». Cette « excellence » qui marque le summum de la foi rejoint la charité chrétienne et la reconnaissance du prochain dans un univers humanisé. L’autre, quel qu’il soit, s’il n’est pas proche, n’en constitue pas moins un maillon de la grande communauté humaine qui puise sa source originelle dans la lignée « adamévique » [19]. « Vous êtes tous issus d’Adam et Adam a été créé de terre » proclame l’islam [20] en totale concordance avec la formule liturgique chrétienne : « Poussière, tu retourneras à la poussière [21] ».
L’invitation à la bienfaisance et la compassion pour autrui résonne tel un écho à travers les enseignements prophétiques : « Ayez pitié de ceux qui vivent sur terre. Celui qui est au ciel aura pitié de vous » ; » Tout bienfait à tout être vivant est récompensé par Dieu « . (Hadith At-Tabarâni [22] ) Substituer la croyance à la foi profonde et sincère revient à réduire la religion au sens unique indiscutable, les autres interprétations relevant de l’inanité, du nihilisme ou du blasphème. Dans l’expression du temporel, cette posture concentre rapidement l’intolérable.
Le musulman vit sa foi avec et parmi ses frères en humanité : Dieu créa l’homme à Son image mais la religion est à l’image de l’homme qui l’exprime en société. Il s’agit d’humaniser la religion, de lui rendre sa raison d’être, de réhabiliter l’esprit face à la lettre, de tisser des liens : liens avec le vivant, liens entre les croyances et les religions, liens entre lecteurs des divers Livres – ou du même Livre Divin, grand ouvert sur les « décodages » individuels ou socioculturels.
Pour Levinas [23], le rapport à la transcendance de Dieu ne se ramène pas à une représentation de Dieu qui le rendrait immanent. Le rapport à Dieu prend sens à partir de la relation au visage de l’autre homme. On ne peut qu’approuver le propos tant il est vrai que la religion est aussi « cette situation où l’on parle à autrui ». Cette dimension apparait dans une célèbre recommandation prophétique en troisième position après la piété et les bonnes œuvres (effaçant les mauvaises) : « (…) et comportes toi envers autrui de la manière la plus noble [24] . »
Pierre Hayat [25] ne dit pas autre chose lorsqu’il affirme que, chez Levinas, « la communication s’articule autour de trois catégories fondamentales : le Même, l’Autre et l’Infini ». On retrouve là exprimé avec d’autres mots cette relation tridimensionnelle soulignée par le hadith ci-dessus (la relation de l’homme à Dieu, de l’homme à lui-même, de l’homme envers son prochain).
Conclusion
La quête de la bienfaisance, de la droiture [26] ainsi que la persévérance ’’ explicitement mentionnés dans la sourate Le Temps [27] , constituent autant d’objectifs nobles vers lesquels tout croyant tend. L’imam ach-Châfi`î [28] , à cet égard, a laissé une célèbre formule au sujet de cette référence coranique très brève : sa méditation serait suffisante, à elle seule, pour la guidée du croyant. Néanmoins, obtenir l’agrément de Dieu repose aussi sur l’amour de l’autre. La formule prophétique « Nul d’entre vous n’aura acquis la foi véridique s’il n’aime pour son prochain ce qu’il aime pour lui-même [29] fait écho à cet amour déchiffré à la lumière du Coran ?
- [1]Aux éditions du Chalet, 1976 ; on peut notamment y lire : « De cet ensemble de données, il ressort que Charles de Foucauld avait réussi à gagner la confiance et l’estime des Touaregs, ce peuple fier, austère et particulièrement difficile à “apprivoiser”. La simplicité de son abord, la douceur de sa parole, sa charité, sa grande piété, lui avaient ouvert beaucoup de cœurs. Sa droiture, son sens de la justice, lui ont valu d’être pris parfois pour arbitre (hakam) dans la Société bédouine traditionnelle, on mesure à quel point le “marabout chrétien” a été adopté par le milieu musulman qui l’environnait ».↩
- [2]Sourate 17 (al Isrâ) et pour les détails notamment Sahih Mouslim, hadith 234 rapporté par Anas ibn Malik↩
- [3] “shi r ‘atan wa minhâjan”↩
- [4]Coran 7, 171↩
- [5]“Al amr bil Ma’rouf wan Nahyi anil Mounkar”↩
- [6]“al yawma akmaltou lakoum diynakoum…” : « Aujourd’hui, J’ai parachevé pour vous votre religion, et accompli sur vous Mon bienfait. J’ai agréé l’Islam comme religion pour vous… ».↩
- [7]Tradition Prophétique, deuxième source de jurisprudence islamique↩
- [8]Hadith rapporté par Boukhari (Livre 55)↩
- [9]Nature primordiale de l’homme ; selon la théologie islamique, les êtres humains naissent avec une connaissance innée du Tawhid,(unicité de Dieu)↩
- [10]Coran 50, 16 et Coran 57, 5↩
- [11]Ahlou al-kitab↩
- [12]Al-amanat, concept central de la théologie islamique. Cf. Coran 33,72↩
- [13]Abou Ḥamid Moḥammed ibn Moḥammed al-Ghazālī (1058-1111), autrefois connu en Occident sous le nom de Algazel est un penseur musulman d’origine persane. Sa pensée théologique et philosophique est résumée notamment dans deux oeuvres majeures : La revivification des sciences religieuses (ihyya ouloum eddine) et (Al-Munqid min adalâl), Erreur et Délivrance. Ici commentaire de ce grand personnage du passage coranique (Coran 41-53) dans l’Ihyya.↩
- [14]Al-Haqq est l’un des 99 attributs divins↩
- [15]Ibn Tofail (1110-1185) : ce philosophe arabe Andalou , médecin et astronome qui a , avec Ibn Ruchd , réfuté avec démonstrations à l’appui la théorie cosmique de l’astronome grec Ptolémée fut aussi mathématicien , mystique soufi et poète. Son œuvre philosophique la plus célèbre est le livre de fiction intitulé « Hay Ibn Yaqdan » qui est hautement révélateur du formidable talent de son auteur . « Le vivant fils du vigilant », mettant en scène un enfant prodige, Hayy ibn Yaqdhan, ou « le philosophe autodidacte » , né par génération spontanée et vivant sur une île isolée près de l’Inde. Cet enfant qui n’a ni père ni mère est élevé par une gazelle et s’éveille seul à la philosophie et à la connaissance de Dieu.↩
- [16]La salat n’est-elle pas ce lien (étymologiquement proche de l’arabe silat) qui permet la rencontre de l’humain avec le divin ?↩
- [17]LELONG Michel, Si Dieu l’avait voulu…, Tougui, 1988↩
- [18]Voir Sahih Mouslim 1-36 ; hadith rapporté par Omar ibn al Khattab, second Khalife « bien guidé ». Après le départ de cet étrange visiteur, le Prophète dira à ses compagnons : « innahou Djibril,âttâkoum liyouaalimoukoum diynakoum : c’est Gabriel qui est venu pour vous enseigner votre religion »↩
- [19]Issu d’Adam et d’Eve, ancêtres de l’humanité↩
- [20]Hadith du Prophète : « Koulloukoum mine Adam wa Adamou mine tourâb »↩
- [21]Gn 3,19↩
- [22]At-Tabarânî (873-960) : de son vrai nom Abu al-Qasim Sulayman ibn Ahmad ibn At-Tabarânî est l’un des plus célèbres mouhaddith-s (rapporteur de aḥadīth)↩
- [23]Emmanuel Levinas (1906 – 1995) est un philosophe français d’origine lituanienne. Il a reçu dès son enfance une éducation juive traditionnelle, principalement axée sur la Torah. La philosophie de Levinas est centrée sur la question éthique et métaphysique d’Autrui, caractérisé comme l’Infini impossible à totaliser, puis comme l’au-delà de l’être, à l’instar du Bien platonicien, ou de l’idée cartésienne d’infini que la pensée ne peut contenir. Levinas étend ses recherches à la philosophie de l’histoire et à la phénoménologie de l’amour. Il est également l’un des premiers à introduire en France la pensée de Husserl et Heidegger↩
- [24]« wa khâliqi ennassa bikhouloukin hassan ». Cf. le hadith rapporté par Ahmed At-Tirmidhi : « Crains Dieu en quelque lieu que tu sois ; fais suivre le péché par la bonne action qui l’effacera ; traite les hommes avec bonté, en faisant preuve de haute moralité »↩
- [25]Philosophe français↩
- [26]Dans l’acception coranique, al haqq implique toute aussi la droiture que la vérité ; par extension quand on est « vrai » on est droit et vice versa.↩
- [27]Sourate Al-Asr ; Coran 103↩
- [28]L’imâm Abû `Abd Allah Muhammad ben Idrîs ach-Châfi`î (767, Gaza, Palestine – 820, Égypte) est l’éponyme de l’école (madhhab) du droit musulman (fiqh) appelée chaféite.↩
- [29]« La you-minou ahadoukoum hatta youhibbou liakhihi ma youhibbou linafsihi » ; cf. Sahih Boukhari et Mouslim. Voir aussi ROUMO Khaled, Le Coran déchiffré selon l’amour, Koutoubia, 2009 »↩