La relation du musulman à Dieu expliquée à des chrétiens
Conférence du Cheikh Mohammed Nokkari, directeur général de Dar el-fatwa et membre du GRIC de Beyrouth à l’Université du Saint-Esprit sur l’approche musulmane de Dieu.
Si dans les trois religions monothéistes, le référent est toujours le même, un Dieu transcendant et personnel, qui s’adresse à l’homme et le requiert, qui établit une relation particulière avec lui, néanmoins les modalités de cette relation varient d’une religion à une autre. Trois chemins différents qui aboutissent au même lieu, sans que le chemin choisi par les uns exclue les chemins des autres. Mais chaque option choisie offre un paysage différent et privilégié pour ceux qui optent pour cette voix ou l’autre. Dans la variété de ce paysage qui borde le chemin de l’Islam vers Dieu nous rencontrons la conception islamique relative à notre sujet : le regard de Dieu sur l’homme et de l’homme sur son frère.
Au risque de schématiser trop ce sujet ou de l’approfondir, je me limiterai à cinq titres qui seront traités au cours de ma conférence.
1. Dieu auquel nous croyons
Je précise tout d’abord que ce titre n’exclut pas le fait que nous, musulmans, chrétiens et juifs, nous croyons en même Dieu, que nous l’adorons et l’aimons, mais chacun de nous le conçoit d’une manière différente que l’autre.
Dans la confrontation de Dieu avec l’homme, l’Islam envisage Dieu tel qu’il est dans son absolu réalité : Unique, transcendant et immuable : « Dis : Dieu est un. C’est le Dieu éternel. Il n’a point enfanté, et n’a point été enfanté. Il n’a point d’égal »
Pour l’Islam Dieu ne s’est pas manifesté à l’humanité sous une forme humaine, ni sous aucune autre forme. Il est dans son Essence inconditionné : « Rien ne lui ressemble ». « La vue ne saurait l’atteindre » Il est l’Unique et l’Impénétrable. On ne peut rien dire pour le qualifier si ce n’est ce qu’Il dit de Lui-même. Les « Beaux Noms de Dieu » révélés dans le Coran ou la tradition islamique évoquent la magnificence de Dieu.
S’il est inaccessible, il l’est par son Essence et non pas par le lien qu’il établit avec l’homme, et c’est à tort que certains pensent que le Dieu des musulmans est inaccessible à l’homme. Le Prophète quand il a évoqué son inaccessibilité il a parlé plutôt de l’impossibilité pour l’intelligence humaine de parvenir à la connaissance de son Essence, il a dit : « réfléchissez sur ce que Dieu a crée et ne réfléchissez pas sur Son Essence sinon vous serez égarés ». Ce qui signifie qu’on doit percevoir Dieu par sa trace dans le monde, par l’intermédiaire de ses attributs (justice, amour, vérité, grâce, puissance,…), accessibles à notre conscience. Réfléchir sur la création de Dieu, et s’éloigner de toutes pensées relatives à l’Essence de Dieu se trouve donc dans le cœur même de la pensée islamique. Dieu dit dans le Coran : « En vérité dans la création des cieux et de la terre, et dans l’alternance de la nuit et du jour, il y a certes des signes pour les doués d’intelligence. Qui debout, assis, couchés sur leurs côtés invoquent Dieu et méditent sur la création des cieux et de la terre (disant) : « Notre Seigneur tu n’as pas créé cela en vain. Gloire à Toi ». Et c’est pour cette raison que certains hadîths rapporté sur le Prophète considère le fait de réfléchir une heure sur la création de Dieu vaut une année de prière.
En islam, l’accent est mis aussi sur l’abandon total à Dieu qui s’exprime par l’adoration considérée comme étant une dette des hommes à l’égard de Dieu. D’où le mot arabe din qui se traduit par religion est tiré de l’ancienne racine dana, dayn, créance qu’il faut acquitter à une date donnée rejoignant l’ancien araméen et l’hébreu pour qui din est égal au jugement et rétribution. L’un et l’autre s’infléchissent pour désigner l’obligation à la quelle l’homme se donne entièrement.
A la différence du judaïsme qui envisage l’homme comme étant le partenaire appelé par l’alliance à parachever la création, et le christianisme qui conserve l’Alliance mais modifie par l’incarnation, le statut conféré à l’être humain, l’Islam appelle au retour à la foi authentique d’Abraham. En d’autres termes à la foi en Dieu qui a précédé la divergence entre un peuple élu co-créateur appelé à parachever l’œuvre de Dieu dans l’attente du Messie et une communauté universelle indépendamment de l’origine et de l’appartenance à une lignée transforme les hommes en fils adoptifs par l’Incarnation du Christ. La foi d’Abraham en montrant à l’homme sa véritable place vis-à-vis d’un Créateur puissant mais aussi miséricordieux et bienveillant, lui demandait de se donner entièrement à lui. De l’aimer et de l’adorer, certes mais aussi de lui témoigner le respect le plus total, et de l’éloigner de tous ce qui porte atteinte à son unicité.
D’où l’action d’abandon libre de soi « Sallama » qui a été choisie pour désigner cette nouvelle religion révélée au Prophète Mohamed « Islam ». Le mot « soumission » qui est en vigueur dans presque la totalité des mots qui traduit le mot « islam » est restrictif et dépréciatif par rapport à ce qui se joue dans ce don, et dans cet abandon libre de soi à Dieu. « Islam » est donc dérive du verbe « aslama » qui signifie se confier, se donner librement. Cette signification a pour corollaire la notion de paix qui se trouve aussi impliquée dans le vocable Islam. Le terme « Salam », en effet est issu de la même origine qu’Islam (SLM) ; il évoque à la fois les notions de paix, de salut, de délivrance, ces biens suprêmes que toute vocation d’ordre temporel ou spirituel aspire à réaliser. En se donnant à Dieu l’homme musulman retrouve sa vraie nature spirituelle, celle qui était rappelée à travers les siècles par tous les prophètes. C’est celle aussi qui était observé par le Patriarche Abraham qui était aussi désigné sous l’appellation de « musulman ».
2. Dieu Créateur :
Les mystiques soufis ont souvent tendance à comparer la création du premier homme à un miroir où Dieu lui-même se regarde. A cette image on oppose le monde avant la création, qui ressemblait à un miroir sans tain.
« Moi », dit le Créateur dans un hadiîth qodsi, « J’étais un trésor caché. J’ai voulu me faire connaître, j’ai créé ma créature pour qu’elle me connaisse. ». C’est par un débordement d’amour et pour partager la connaissance qu’il a de lui-même, que Dieu a crée le monde. Dieu est essentiellement le Créateur Al-Khâlik, et c’est parce qu’il est Créateur qu’il crée le monde, et non parce qu’il crée le monde qu’il devient le Créateur. C’est d’abord dans cette création que Dieu se révèle, qu’il s’auto – communique. Mais sans l’être humain, l’univers ne peut pas représenter quelque chose d’entier, de vrai : seul l’homme synthétise toutes les formes de l’être ; l’intégrité du monde se concrétise en lui seul et le plus important est qu’il est le seul apte à prendre conscience de cette intégrité. L’homme, l’Adam, se fit vrai « un miroir travaillé » dans la réflexion divine. Dans l’homme, à travers lui, le Dieu Absolu vient à prendre conscience de lui-même. L’homme occupe la place centrale dans l’univers parce qu’il est la cause de l’apparition du monde.
Dans le récit coranique, Dieu a annoncé son projet de créer une espèce humaine aux anges, Il leur dit : « Je suis entrain de créer une espèce humaine d’une argile quand je l’aurais rendu complet et lui aurait insufflé de mon Esprit, tombez devant lui prosternés ». Lorsque les étapes de la création se seront réalisées et que l’esprit de Dieu aura été insufflé à sa créature humaine, l’homme sera doté des facultés qui le distinguaient des autres créatures terrestres. La faculté suprême dont Dieu a doté l’homme est : l’intelligence. Cette situation dans laquelle Adam s’est vu placé en tant qu’ayant reçu la primauté des dons divins et des capacités humaines fait de lui le premier homme sur terre à représenter la génération devant discerner entre le bien et le mal et donc à assumer la responsabilité. Cette génération est celle qui a commencé par Adam et qui continuera jusqu’au jour de la résurrection. Avant Adam, il n’y avait point de responsabilité de la charge à assumer : « il y avait des créatures qui s’entretuaient et disparaissaient pour ne point revenir », ce fut la réponse des anges au moment où Dieu leur annonçait la création d’Adam.
Cette suprématie de l’homme sur les anges trouve son explication aussi dans le degré de la connaissance dont Adam a atteint. Ceci met l’accent sur la supériorité de la connaissance humaine sur celles des anges en d’autres termes la prééminence du savoir avec piété sur la piété sans le savoir. Cette prééminence de l’intellect et du savoir se reflète dans le Coran et dans les paroles du Prophète Mohammad. Je cite le célèbre verset coranique dans sourate fater : « 27. N’as-tu pas vu que, du ciel, Dieu fait descendre l’eau ? Puis nous en faisons sortir des fruits de couleurs différentes. Et dans les montagnes, il y a des sillons blancs et rouges, de couleurs différentes, et des roches excessivement noires.28. Il y a pareillement des couleurs différentes, parmi les hommes, les animaux et les bestiaux. Parmi Ses serviteurs, seuls les savants craignent Dieu. »
Dans un hadîth le Prophète Mohamed compare le rang qu’occupe le savant et celui qui se consacre à l’adoration de Dieu, au rang qu’occupe le Prophète lui même et le plus commun parmi les gens. Un autre hadîth mentionne que « Celui qui se trace un chemin en vue d’apprendre une science, Dieu lui trace un chemin au paradis. Les anges se soumettent à celui qui cherche à apprendre une science, le savant vaut mieux que celui qui se consacre à l’adoration de Dieu, Sa place est comme la lumière diffusée par la pleine lune par rapport aux lumières des autres planètes. Les cieux, la terre et toutes les choses et mêmes les baleines dans l’eau implorent le pardon aux savants. » Les commentaires de hadîth explique que l’adoration consacrée à Dieu profite à celui qui l’accomplit, tan disque la science du savant se rayonne à toute l’humanité.
Une autre originalité de la pensée islamique sur la création est l’absence du dogme du pêché originel transmis à l’humanité et qui a changé substantiellement l’intégrité des hommes. Dans l’histoire coranique du pêché des premiers êtres humains, Il n’y est pas fait mention du rôle d’Eve comme la première à violer l’interdiction divine en mangeant le fruit de l’arbre, ni du fait que c’était elle qui, la première, céda aux tentations de Satan. La responsabilité incombaient à tous deux précisent la totalité des versets coraniques qui parlent de la tentation de Iblis. Plus important encore, la tradition islamique minimise la signification du pêché originel, le réduisant seulement à une faute. Selon le Coran, Adam, a simplement oublié l’ordre divin et ensuite s’est repenti. Dieu a admis sa pénitence, « Et le ramena à lui et le dirigea sur la voie véritable« . Nous pouvons voir la fuite d’Adam et Eve du Paradis non pas comme un châtiment mais comme une possibilité donnée à l’homme de gagner le paradis dans sa vie future par son travail sur la Terre. L’être humain est innocent par nature : il est né non seulement sans pêché mais aussi croyant par fitra et n’est transformé que par sa propre volonté et puis par l’influence de l’éducation et de l’environnement. Le péché dans l’islam pourrait donc se décrire comme une infraction à un code de la loi, et non pas comme une blessure infligée par le pécheur à l’amour de Dieu.
D’après l’Islam, aussi « gagner son pain à la sueur de son front » et nourrir ainsi sa famille n’est pas un châtiment dû au pêché originel mais plutôt une action de dévotion au même titre que les devoirs religieux proprement dits. « Enfanter dans la douleur » n’est pas un châtiment pour Eve ni pour les femmes en général mais, au contraire, selon l’Islam il s’agit d’un des actes les plus grands d’autosacrifice. Il en est de même pour la recherche des intérêts terrestres. La meilleure conduite à tenir par l’homme n’est pas de rejeter le terrestre pour le divin ou inversement mais d’opter pour le juste milieu. « Ne pas interdire les biens autorisés par Dieu » est dans l’esprit de l’appel coranique. Le Prophète conseillait à ses compagnons de ne pas être excessifs dans l’accomplissement des obligations religieuses. Il rejetait la dévotion exagérée qui consistait, entre autres, à renoncer aux biens terrestres et aux plaisirs. Sa réaction extrêmement négative devant la décision d’un musulman qui a fait voeu de chasteté et de célibat est très connue : « le mariage est ma tradition celui qui rejette ma tradition ne fait pas partie de ma communauté » :
De la création de l’homme nous retiendrons la volonté de Dieu de se faire connaître et de faire partager à l’homme le plaisir de contempler l’univers, de réfléchir sur la création des cieux, de la terre et de lui – mêmes, ainsi que de chanter la louange de son Créateur. Dans un hadîth qodsi Dieu dit : « Mes créatures, je ne vous ai point crées pour combler Ma solitude, ni pour vous existiez nombreux autour de Moi, ni pour que vous M’aidiez à réaliser quelques taches qui M’auraient résisté, ni pour un profit quelconque ou pour M’éviter un mal, mais pour que vous M’invoqueriez beaucoup et pour que vous chantiez Mes louanges matin et soir »
3. La proximité de Dieu
Après le regard de l’homme envers son Créateur, on passe maintenant à l’égard du Créateur envers l’homme. L’Islam dans la relation qui lie Dieu à l’homme met l’accent sur la proximité du Dieu : « Il est plus prêt de nous que nos veines jugulaire » précise un verset coranique. Une proximité qui ne peut être comprise que dans un contexte d’amour fascinant du Créateur vis-à-vis de sa propre création. Une proximité qui fait de Dieu d’être à l’écoute de sa créature en permanence, de l’écouter mais aussi d’entrer en communication avec lui sans aucun intermédiaire. Un des versets coraniques dit à ce sujet : « Quand Mes serviteurs t’interrogent sur Moi.. alors, Je suis tout proche : Je réponds à l’appel de celui qui Me prie quand il Me prie. Qu’ils répondent à Mon appel, et qu’ils croient en Moi, afin qu’ils soient bien guidés. »
Dans le récit coranique l’homme a été crée dans la forme la plus parfaite, Non pas à l’image et à la ressemblance de Dieu mais selon ses formes (c’est-à-dire selon l’ensemble de ses noms et qualités). Cependant il a été crée faible, et sans la grâce de Dieu et sa miséricorde il sera abandonné et délaissé. C’est pour cette raison que Dieu s’est imposé à lui-même la loi de la grâce et de la miséricorde. Ajoutons à cela le fait que chacun des cent quatorze versets du Coran débutent par la formule suivante « Au nom de Dieu, le tout miséricordieux, le très miséricordieux ». Cette formule est employée aussi par le musulman lors de chaque geste quotidien tout au long de la journée. Une sourate du Coran porte le titre le tout miséricordieux Al Rahman, et une multitude des hadith mentionnent la miséricorde de Dieu envers ses créatures. Un de ses hadith dit : « Quand Dieu a crée les créatures, Il a écrit dans un livre, celui-ci est avec Lui au-dessus du trône : Ma miséricorde a devancé Ma colère. » Il me semble donc tout à fait clair que les attributs « Celui qui pardonne » et « Le Gracieux », « Le Miséricordieux » expriment parfaitement ce que nous entendons par « l’amour » de Dieu. Les témoignages de l’amour en Dieu sont multiples, et beaucoup d’eux sont partagés par les trois religions monothéistes. Parmi les textes qui sont en commun entre chrétiens et musulmans je cite le hadith qodsi dont vous trouverez un texte proche dans l’Evangile selon Mathieu : « Dieu Tout Puissant dira le Jour de la Résurrection : O fils d’Adam, Je suis tombé malade et tu ne M’as pas rendu visite. L’homme dira : O Seigneur, comment puis-je Te rendre visite quand Tu es le Seigneur des mondes ? Dieu dira : Ne savais-tu pas que Mon adorateur Un tel était tombé malade, et tu ne l’as pas visité ? Ne savais-tu pas que si tu l’avais visité, tu M’aurais trouvé avec lui ? » Le hadîth poursuit ensuite la conversation entre Dieu et l’homme au sujet de la nourriture et de la boisson. Je cite un autre hadîth qodsi : « Dieu Tout Puissant a dit : « Je suis comme Mon adorateur s’attend à ce que Je sois. Je suis avec lui quand il M’invoque. S’il M’invoque dans son for, Je l’invoquerai auprès de Moi, et s’il M’invoque dans une assemblée, Je l’invoque dans une assemblée meilleure encore. Et s’il s’approche de Moi d’une coudée, Je m’approche de lui d’une brasse. Et s’il vient à Moi en marchant, je viens à lui en courant ».
D’autres exemples sont tirés des paroles du Prophète Mohammad : « Une fois le prophète sortait de chez lui avec ses compagnons il a rencontré une mère qui venait de retrouver son enfant qui était perdu, elle le serrait dans ses bras et pleurait. Le prophète dit à ses compagnons est ce que vous trouvez que cette mère a de l’amour pour son fils ? Ils ont répondu oui, le Prophète a dit : « Dieu a encore plus de miséricorde envers son fils »« .
4. L’utilité de l’homme devance sa piété :
Dans le rapport de l’homme avec son frère, l’Islam met en évidence l’utilité que l’homme a pour la société, de telle sorte que cette utilité devance la piété. Un des mots prononcé par le deuxième Calife Omar vis-à-vis d’une personne qui travaille pour subvenir au besoin de son frère s’abandonnant à la prière : « son frère est mieux que lui » confirme l’intérêt que l’islam attache à l’utilité de l’homme pour sa société. Non seulement cette utilité profite aux autres individus pendant le vivant de la personne qui l’accomplit mais aussi se prolonge après sa mort : comme lorsqu’il s’agit d’une fondation charitable ou humanitaire, ou lorsqu’il s’agit d’une découverte scientifique ou d’un ouvrage mis à la disposition des chercheurs, ou même lorsque la personne a laissé des descendants qui perpétuent ses œuvres. Alors que la piété ne profite qu’à la personne qui s’y donne pendant son vivant. Un des hadîth célèbres mentionne que : « tous les actes de l’homme cessent après sa mort sauf en cas d’une aumône perpétuelle, ou d’une science qui profite aux autres, ou lorsqu’il laisse un fils vertueux qui implore le pardon pour son père ».
Dans ce rapport le véritable musulman se définit, comme le déclare le Prophète par celui qui s’écarte de tous ce qui est nuisible pour son frère, nuisible est entendu ici par ce qui porte atteinte aux autres en paroles et par des gestes. En d’autres termes c’est un rapport de paix, de « salam » un des corollaires du mot Islam.
Un autre élément qui régularise le rapport entre les hommes est l’équité et le pardon. « Et quand vous jugez entre les gens, de juger avec équité » précise le Coran et poursuit dans un autre verset : « Et celui qui endure et pardonne, cela en vérité, fait partie des bonnes dispositions et de la résolution dans les affaires. Donc ce n’est pas exacte ce que certains écrivains Occidentaux prétendent que l’islam ne connaît que la vengeance. Même la conduite du Prophète en cette matière reste exemplaire et trace l’exemplaire à suivre. Après sa victoire à la Mecque et son entrée dans sa ville natale, le Prophète s’est adressé à ses ennemis qui l’ont chassé de cette ville et longuement combattu : « qu’est ce que vous attendez à ce que je fasse de vous .. partez vous êtes libres. »
Dans ce rapport qui lie l’homme à son frère, Dieu est toujours présent. Non seulement il connaît les agissements de l’homme (puisqu’il est le Savent et l’Omniscient) mais aussi il réjouit de nos bons actions et s’indigne lorsqu’ils sont mauvaises. La tradition du Prophète est très riche en cette matière, et des hadîths sont invoqués même au sujet de nos rapports avec les animaux. Un de ces hadîth raconte qu’un homme se trouvant assoiffé dans le désert, il a trouvé un puits d’eau, il est descendu et bu ce qu’il pouvait, en remontant il a trouvé un chien assoiffé, il est redescendu et mit de l’eau dans ses chaussures et les a portées au chien. Devant ce geste Dieu l’a gratifié et lui promit le paradis. Un autre hadîth mentionne le cas d’une femme qui sera châtiée dans l’au-delà par une chatte qu’elle avait gardée chez elle jusqu’ a ce qu’elle soit morte de faim, elle ne lui avait pas donné à mangé, et ne l’avait pas laissé manger de la nourriture de la terre. Une multitude des hadîths vont aussi dans ce sens et confirme l’importance de l’utilité par rapport à la piété. Sur une question qui avait été posé au Prophète sur le meilleurs actes que l’homme peut accomplir vis-à-vis de son seigneur, le Prophète répond : « c’est le cas d’un homme qui entre la joie dans le cœur d’un autre : s’il le trouve faim il lui donne à manger, s’il a une dette il la rembourse à sa place et s’il a une difficulté il lui résolve. Et il poursuit si quelqu’un parmi vous accomplit une geste pour aider son frère, cela vaut mieux qu’une retraite de deux mois dans ma mosquée ». Même le fait de rencontrer les gens en souriant ou d’écarter ce qui nuit les passants dans la rue sont considérés comme des bonnes actions qui méritent d’être récompensées dans l’au-delà.
Donc c’est à travers Dieu que le rapport entre l’homme et ses semblables s’identifie et s’accomplit. Le mot semblable ici ne doit pas exclure le rapport qui lie l’homme à tous les êtres vivants et toutes les choses que Dieu nous a laissées pour s’en servir de la meilleure façon. Le respect des animaux, de la nature et de l’environnement passe aussi par notre relation avec Dieu. Il n’est pas étonnant dès lors que Dieu est présent dans toutes nos relations : quelles soient avec lui, avec nos semblables et avec la nature qu’elle nous entoure.
5. La diversité et le respect de l’autre
Si Adam a été crée et insufflé par le souffle de Dieu, ses descendants, sans distinction de leur race, de leurs couleurs et de leurs appartenances religieuses portent en eux-mêmes ce même souffle Divin. L’Islam tout en confirmant leurs appartenances au même ligné adamique, reconnaît la diversité de leurs races et la multiplicité de leurs appartenances religieuses.
Cette diversité outre le fait qu’elle est voulue par Dieu, et ne constitue pas un défit à sa volonté divine, l’Islam établit plusieurs principes sur lequel repose les relations entre les hommes, Parmi ces principes :
1. L’être humain, tout être humain doit être respecté et estimé. Depuis qu’il est foetus, en passant par son age d’enfant, et puis d’adulte et en fin quant il atteint la vieillesse, l’islam met en place des règles juridiques et morales qui garantissent sa vie et sa dignité. Sa vie en partant du verset coranique qui interdit le meurtre et le considère comme un crime contre toute l’humanité : « Quiconque tuerait une personne non coupable d’un meurtre ou d’une corruption sur terre est considéré comme tuant toute l’humanité ». Il en va de même pour l’interdiction de faire assumer à une personne la responsabilité d’un tort qu’il n’a pas commis : « Personne ne portera la responsabilité d’autrui » précise le Coran. Sa dignité est aussi doit être respectée. Même lorsqu’il meurt l’islam exige quoi qu’elle soit sa religion et sa race, une conduite exemplaire témoignant du respect le plus total pour son corps et l’endroit où il va être enterré. Un hadîth raconte que le Prophète s’est arrêté devant les funérailles d’un juif avec modestie et respect, ses compagnons lui ont dit mais il s’agit des funérailles d’un juif, le Prophète a répondu il s’agit plutôt de l’âme d’un être humain.
2. La diversité de la race, de la couleur de la langue est voulue par Dieu. Un des versets coraniques dit : « Et parmi Ses signes la création des cieux et de la terre et la variété de vos idiomes et de vos couleurs. Il y a en cela des preuves pour les savants » et poursuit dans un autre verset : « Et si ton Seigneur avait voulu, Il aurait fait des gens une seule communauté. Or, ils ne cessent d’être en désaccord (entre eux,). » Un autre verset annonce que l’intérêt de cette diversité doit être l’établissement des relations entre les peuples ; il dit : « Nous vous avons créés d’un mâle et d’une femelle, et Nous avons fait de vous des nations et des tribus, pour que vous vous entre – connaissiez. »
3. La diversité de la foi religieuse est considérée comme un fait naturel, or Dieu n’a pas voulu que les hommes adoptent la même religion. Le Coran le mentionne clairement : « Si ton Seigneur l’avait voulu, tous ceux qui sont sur la terre auraient été des croyants. Est ce à toi de contraindre les gens à devenir croyants ? ».
4. Partant de ce principe, le Coran proclame la liberté de conscience : « pas de contrainte en matière religieuse ». C’est ce même verset qui a servi de base dès la première génération de l’Islam aux jurisprudences et aux édits de tolérance envers les autres communautés religieuses. L’islam à partir de là doit être prêché et non point imposé.
5. Partant de ce même principe les relations qui entretiennent les musulmans avec les non musulmans dans un Etat islamique ne doivent pas être placées sous le signe d’une tolérance indéfinissable, toujours révocable à merci, mais dans le cadre du droit musulman. Ce droit qui puise ses sources du Coran et de la Sunna, souligne en se référant au Coran que : « Le plus noble d’entre vous, auprès Dieu, est celui qui le craint le plus »
6. L’islam en tant que religion révélée reconnaît tous les prophètes qui ont été envoyé à l’humanité depuis la création d’Adam jusqu’au dernier Prophète Mohamed. « Dites (je cite le Coran qui s’adresse au Prophète) : « Nous croyons en Dieu et en ce qu’on nous a révélé, et en ce qu’on n’a fait descendre vers Abraham et Ismaël et Isaac et Jacob et les Tribus, et en ce qui a été donné à Moïse et à Jésus, et en ce qui a été donné aux prophètes, venant de leur Seigneur : nous ne faisons aucune distinction entre eux. Et à Lui nous sommes Soumis ». Cette croyance concerne aussi les livres révélés qui ont été envoyés à ces prophètes particulièrement le Torah et l’Evangile considérés comme une lumière et un guide : « Et Nous avons envoyé après eux Jésus, fils de Marie, pour confirmer ce qu’il y avait dans la Thora avant lui. Et Nous lui avons donné l’évangile, où il y a guide et lumière, pour confirmer ce qu’il y avait dans la Thora avant lui, et un guide et une exhortation pour les pieux. »
7. Chrétiens et juifs appartiennent donc aux religions du livre. Le Coran demande aux musulmans de dialoguer avec eux de la meilleure façon étant donné que leur Dieu et le Dieu des musulman est le même : « Dis : “ô gens du Livre, venez à une parole commune entre nous et vous : que nous n’adorions qu’Allah, sans rien Lui associer, et que nous ne prenions point les uns les autres pour seigneurs en dehors de Dieu ». Puis, s’ils tournent le dos, dites : “Soyez témoins que nous, nous sommes soumis ». « Et ne discutez que de la meilleure façon avec les gens du Livre ».
8. Les chrétiens bénéficient d’une situation privilégiée dans la conscience des musulmans. Le Coran le mentionne très nettement, il dit : « Tu trouveras certainement que les Juifs et les associateurs sont les ennemis les plus acharnés des croyants. Et tu trouveras certes que les plus disposés à aimer les croyants sont ceux qui disent : “Nous sommes chrétiens.” C’est qu’il y a parmi eux des prêtres et des moines, et qu’ils ne s’enflent pas d’orgueil ».
9. En outre les musulmans croient au Christ Prophète vivant, et honore sa mère la très Sainte Vierge Marie qui occupe la place la plus importante parmi toutes les femmes de l’univers durant notre vie terrestre et dans l’au-delà. Les musulmans croient aussi au retour du christ comme le dernier signe avant l’annonce du jour de jugement. Sa descente sur terre a pour objet sa triomphe sur l’antéchrist et plus important l’unification de l’Islam et du christianisme pour ne devenir qu’une seule religion.
De la relation homme / homme nous retiendrons pour conclure que le statut de l’être humain doit être placé au dessus de tout intérêt matériel. Là où la science, et l’utilité de l’homme devancent la piété et l’adoration de Dieu, la religion ne peut être par conséquent qu’un facteur de progrès sur laquelle il vaut mieux compter pour établir des relations stables et fraternelles entre les peuples. Le Prophète dans un hadîth dit : Les hommes sont les protégés de Dieu, les plus aimés par Dieu parmi eux sont les plus utiles à ses créatures.