Tunis 19-20-21 novembre 2013
http://www.jtcfestival.com.tn/fr/colloque-art-religion.html
En marge des Journées Théâtrales de Carthage (JTC), un colloque scientifique, ayant pour thème « d’Art et de Religion » s’est tenu à l’Hôtel Africa à Tunis, en présence de nombreux universitaires, d’écrivains et d’artistes, venus du Maghreb, Moyen Orient et du Sénégal. Il s’est penché sur un problème crucial dans les pays du Printemps arabe en particulier et du monde musulman en général, le terme « Religion » ayant été très souvent synonyme « d’Islam ». Un public large et varié, avec en particulier de nombreux jeunes, a contribué au succès de cette manifestation.
Wahid Essafi, directeur des JTC justifie le choix du thème comme répondant à un désir d’enracinement dans l’époque actuelle, la créativité et ses corollaires étant des marqueurs très forts de cet enracinement. Cette idée a notamment été développée par Zaim Khenchelaoui dans « l’imagerie mystique comme vecteur de l’identité culturelle maghrébine ».
Le directeur des JTC rappelle que la créativité ne peut être que libre et ne peut subir aucune contrainte, aucune limite, aucune censure. Théoriser, au nom d’une certaine idée de la religion pour corseter l’expression artistique ôte toute valeur, toute identité profonde à la création. Elaboré par des faits humains, le rapport entre art et religion subit des tensions opposées. Au nom de la religion, certains prétendent protéger la sacralité de toute intrusion artistique et poussent cette relation vers le pôle de l’interdit et de l’illicite. Plusieurs intervenants (Assaad Jomaa, Youssef Seddik, Habib Bida entre autres) ont tenté de répondre aux questions remises à l’ordre du jour: le Livre révélé de l’Islam a-t-il imposé des restrictions, des tabous à l’exercice libre d’une expression par le corps, qu’elle soit danse, comédie, drame ou tragédie ? Les arts figuratifs sont-ils licites en Islam ?
Les rapports entre Art et religion ont été appréhendés sous leurs différents aspects.
Pour certains intervenants ces deux notions sont insécablement liées même si elles sont de toute évidence, antagonistes dans plusieurs de leurs aspects, l’art ayant une vocation à servir la sphère religieuse tout en ayant une propension à la rébellion (Yadh ben Achour). Dieu aime la beauté, alors l’Islam ne serait-il pas une religion promotrice des arts ? (Abubaker Ahmed Bagader).
Art et Religion, sont deux expressions de l’univers intérieur de l’homme, des reflets de sa volonté d’élévation. Cela se traduit dans la pensée et la pratique soufie (Md Habib Allani), dans la littérature où « tant que l’homme réalise sa transcendance et vit harmonieusement son être dans la monde, il n’existe pas de contradiction entre littérature, arts et religion » (Fadhila Chebbi).
La fécondité de la réflexion est venue aussi du fait que l’analyse théorique( « L’image entre les évolutions théoriques de la religion et les bouleversement artistiques » étudiés par Adel Khidhr, « L’imitation du sacré » par Md Mahjoub, « Problématique de l’imitation » par Abdehalim Messaoudi) s’est accompagnée de nombreux exemples comme « les masques religieux dans la poésie contemporaine » (Md Ghozzi), « L’image du Coran dans la calligraphie arabe » (Hayet Amamou) « arts plastiques et religion au Maroc » (Hakima Lebbar), « Esthétique des rituels religieux dans la représentation théâtrale » ((Firas Alraimouni), « le discours religieux dans le cinéma » (Mahmoud Kassem) ou encore « religion, musique et théâtre » au Sénégal (Abdoulya Niang et Massamba Gueye).
Toutes ces contributions ont éclairé de manière savante, libre et riche le débat sur Art et Religion, réjouissant le cœur des auditeurs, ouvrant des espaces de liberté et laissant espérer des relations apaisées entre le religieux et le culturel.
GRIC Tunis