Cet article de Mohamed Sghir Janjar réagit par rapport au texte d’Anne Balenghien, Une éthique, pour quels dialogues et au texte de Jean-Luc Blanc, Prosélytismes
La question de la liberté religieuse est-elle une question occidentale sinon chrétienne ? (texte Jean Luc Blanc)
En posant cette question Jean –Luc Blanc souligne que lorsque ce point (liberté de conscience) a été intégré à la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, il n’y avait pas de musulmans autour de la table. Il se pose la question suivante : « Si des musulmans avaient participé à la rédaction de la Déclaration, auraient-ils exigé le retrait de cette notion ? ». La liberté religieuse est-il consubstantiellement liée à l’apostasie dans l’histoire et la théologie musulmane ? C’est donc à ces questions que je compte répondre dans un premier temps :
Attitudes des pays musulmans par rapport à la Déclaration de 1948 : Entre septembre et décembre 1948, le 3ème comité des Nations Unies a tenu 85 réunions pour discuter et travailler le texte proposé par la Commission des Droits de l’Hommes aux NU. Après de nombreux amendements, le texte est adopté par l’Assemblée générales des NU, le 10 décembre 1948, par 48 voix contre 8 et 8 abstentions. Ces dernières sont venues des pays socialistes de l’Europe de l’Est, de l’Union Sud Africaine et de l’Arabie Saoudite.
Les positions des pays musulmans (ceux qui étaient à l’époque indépendants et membres des Nations Unies) étaient divergentes. Ainsi des pays comme le Pakistan, l’Egypte, l’Irak, le Liban et la Syrie ont voté en faveur du texte, l’Arabie Saoudite s’est abstenue alors que le Yémen n’était pas présent lors du vote.
Un des assistants de Eleanor Roosevelt (épouse du Président des Etats Unis) raconte que le représentant de l’Arabie Saoudite avait essayé de rallier celui du Pakistan à la position de son pays en évoquant notamment que la disposition favorable au droit de changer de religion était contraire aux préceptes de l’islam, Mohammad Zafrullah Khan, président de la délégation pakistanaise avait répondu que ce précepte existe dans le Coran, mais que lui considère l’hypocrisie un péché plus grave que le changement de religion. Et il a expliqué qu’aucune personne n’a à professer une religion en laquelle elle ne croit pas. Il récita en plein assemblée générale un verset coranique (le 108 de la sourate 10 : Jonas) qui dit : « Celui qui est dirigé, n’est dirigé que pour lui même, celui qui s’égare ne s’égare qu’à son propre détriment. Je ne suis pas un protecteur pour vous » [1].
J’ai cité cette anecdote pour montrer que les Musulmans ont participé au débat qui a eu lieu lors de l’élaboration du texte final de la Déclaration de 1948, et que contrairement à ce qu’on pense, aujourd’hui, sous l’impact d’un climat idéologique marqué par une certaine forme de fanatisme religieux, la majorité des pays musulmans présents été non seulement pour le texte, mais défendait une interprétation du Coran compatible avec l’esprit de la Déclaration dont notamment la disposition relative à la liberté de conscience.
L’Islam, pluralismes religieux et liberté religieuse.
Je pense que chacun de nous pourrait faire comme Jean Luc Blanc : essayer de trouver dans sa propre tradition religieuse, une généalogie du pluralisme et de la liberté religieuse. Dans le cas de l’islam, beaucoup de voix se sont élevées au XXè siècle pour défendre un tel droit en cherchant ses fondements dans le Coran, le Hadith, la conduite du Prophète ou l’histoire de l’islam. Leurs arguments sont connus. Il reste à mon sens que dans la majorité des cas, cet effort s’apparente à un bricolage intellectuel tant qu’on n’a pas reconnu que la notion de liberté de conscience ou liberté religieuse telle que nous la pensons aujourd’hui, appartient au registre épistémologique moderne. Le penseur iranien, Abdelkérim Sourouch, est, à mon sens celui qui, dans le monde musulman, est allé le plus loin dans le renouvellement du questionnement théologique sur cette question. Il le fait évidemment en s’appuyant à la fois sur les acquis des sciences sociales et humaines modernes, et sur les savoirs islamiques classiques. Comment procède t-il ?
Voici un très rapide résumé des idées qu’il développe dans un recueil d’articles intitulé « Les droits chemins » [2].
Le pluralisme des lectures et des commentaires : Dans son principal ouvrage « al-qabd wa al-bast fi al-shari’a [3] » , il utilise la distinction kantienne entre phénomène et noumène (les choses en soi telles qu’elles sont indépendamment de la connaissance que nous en avons) pour expliquer la pluralité des regards et des lectures des sources de la religion musulmane. Ces dernières constituent la religion qui n’est accessible que par le biais de la connaissance religieuse que produisent les hommes en fonction de leur temps et des savoirs dont ils disposent. Pour Sourouch, il n’y a pas de religion non commentée, et le commentaire ne peut être que pluriel. C’est dans ce sens qu’il considère que les versets coranique ne sont pas saturés de significations comme on le pense souvent, mais au contraire, ils appellent commentaire et explication. Autrement dit, le sens n’est pas logé dans le texte, mais c’est une production renouvelée à partir de la relation dynamique du texte / lecteur / contexte. C’est dans ce sens là que nous devons comprendre l’affirmation : « Le Coran est pour tous les temps ». Autrement dit, il n’y a pas de religion sans une connaissance religieuse aussi simple soit elle. De même qu’il n’y a pas de connaissance religieuse coupée des autres connaissances humaines. C’est ce que Sourouch appelle « unité de la connaissance humaine ».
Le sens perdu et l’œuvre de la raison : Je dirai même à la suite de Sourouch que le drame des littéralistes est qu’ils croient posséder le Sens du message, alors que ce dernier ne nous est pas donné. Il se serait perdu à jamais… Si le Prophète avait un accès direct (par le fait d’une inspiration divine) au vrai sens du verset coranique, nous, les simples êtres humains –musulmans ou pas-, sommes exclus, de par notre statut existentiel, du cercle de la prophétie. Il nous est fermé, sinon nous serions tous des prophètes. Que nous reste t-il pour comprendre le message révélé ? La seule et unique voie ou médiation dont nous disposons, quoi qu’en pensent les mystiques, est la raison humaine. Exclus du cercle prophétique, il nous reste le cercle herméneutique : l’effort que doit faire chacun de nous en recourant aux ressources de sa raison (donc au langage, aux savoirs de son époque et à son expérience toujours imparfaite) pour accéder à un sens changeant et relatif. Or les littéralistes n’acceptent pas d’être réduits au statut d’orphelins du Sens. Ils trouvent insupportable une foi vécue en permanence dans la nuance et la fragilité du doute. La solution qu’ils ont trouvée : transformer une nuance (leur vérité personnelle) en une vérité unique et massive qu’ils s’imposent et imposent aux autres.
Le pluralisme religieux : pourquoi y a-t-il plusieurs religions et pas une ? Sourouch se réfère aux soufis (notamment Rumi dans son Mathnawi) pour développer une série de réflexions sur le pluralisme religieux :
1. Le pluralisme religieux correspond à la pluralité des expériences spirituelles vécues par les Prophètes. Chacun d’eux a eu une vision particulière même si la Vérité est une et unique (voire la parabole de l’éléphant). Autrement dit, le pluralisme religieux ne dépend pas, selon Sourouch, des changements des conditions sociales, ni de l’altération des anciens messages, mais cela est dû au fait que Dieu se manifeste ou advient de manières différentes à l’être.
2. Sourouch emprunte à Rumi l’idée de « l’accumulation des vérités ». Ainsi le pluralisme religieux ne serait pas dû à l’altération des messages par des faussaires ou par le temps, mais c’est que les vérités s’accumulent et l’être humain se voit pris dans le doute face au foisonnement de messages tous véridiques. Il n’y a pas, selon Rumi relu par Sourouch, des hommes sur le droit chemin et d’autres en pleine errance, mais c’est que les vérités qui se manifestent à eux sont tellement nombreuses qu’ils doivent choisir une à suivre en fonction de leurs contextes respectifs. Le pluralisme religieux n’est pas l’œuvre d’un esprit malin (Satan), mais l’expression de la miséricorde divine pour le salut de tous les humains.
3. Le fait que Dieu se donne comme nom al-Hadi (Celui qui guide les hommes) dans le Coran, ne signifie pas, selon Sourouch, qu’Il se donne un titre honorifique. L’action de miséricorde ne se limite pas à l’envoi de prophètes en vue d’orienter les hommes sur le droit chemin. Le terme coranique « Hadi » et « hidaya » n’ont de sens que parce que la bien- guidance de Dieu atteint la majorité des humains et non seulement les Musulmans ou les Chrétiens
4. Allant plus loin, Sourouch interprète le passage coranique où il est dit que tous les Prophètes sont sur le « droit chemin » (sirat mustaqim) en affirmant que le sens du verset est que chaque Prophète évolue dans son propre droit chemin. Il s’agit donc d’une multitude de chemins droits inspirés par Dieu. Ils peuvent se croiser et concorder, mais ils restent multiples.
5. Le pluralisme positif est, selon Sourouch, celui où les alternatives disponibles sont toutes bonnes, mais ne sont pas interchangeables. Chacune d’elles a ses caractéristiques spécifiques. Les religions sont ainsi comme autant de réponses justes à une seule question.
6. Sourouch se réfère aussi à la distinction qu’opèrent les soufis dans la religion entre le Vrai (Haqiqa) et la Shari’a (plus axée sur les aspects contingents du vécu religieux). Il considère ainsi que les distinctions opérées par les fuqaha (juristes musulmans) entre croyant (mu’min) et non-croyant (kafir) relèvent d’une terminologie juridique qui est en usage dans la plupart des traditions religieuses, et qui correspond au niveau contingent (relatif et changeant) de l’expérience religieuse.
Islam : débat théologique sur le statut du croyant
Nous connaissons le statut des dhimmis accordé par l’Etat musulman aux gens du Livre (Juifs et Chrétiens et les Sabéens). Le concept de « gens du Livre » a été souvent élargi pour inclure tous ceux qui avaient un semblant de livre comme les Mazdéens et les Hindouistes auxquels les Musulmans ont accordés très tôt le même statut que les Juifs et Chrétiens. Ils avaient le droit de garder leurs croyances, de célébrer leurs cultes, d’avoir leurs institutions, leurs juridictions ainsi que leurs représentants auprès des autorités. Malgré la grande tolérance dont a fait preuve l’islam par rapport aux autres traditions religieuses jusqu’à l’époque moderne, les dhimmis ont fait l’objet de multiples discriminations (certaines fonctions leur sont interdites selon les contextes ; leurs lieux de cultes ne doivent pas dépasser ceux des musulmans en hauteur, l’appel à la prière ne doit pas couvrir celui des musulmans, paiement de la jizia (un impôt spécial), etc.
Plus intéressant encore est le débat théologique qu’a connu la communauté islamique primitive (dès la seconde moitié du 1er siècle de l’Hégire). Il a été déclenché par les différends politiques qui ont provoqué la « grande discorde » (fitna al-kubra) et ont fait que chaque groupe théologico-politique a entrepris d’excommunier ses adversaires en leur collant le statut de kafir (infidèle) ; ce qui n’est pas sans rappeler certains aspects du débat actuel au sein du monde musulman. Lors de ce débat une grande partie des théologiens musulmans (quelle que soit, par ailleurs, leur obédience juridique) étaient pour la théorie de l’irjaâ (signifie littéralement : différer son jugement en considérant que Dieu seul tranchera le jour du grand jugement et décidera qui est croyant et qui est infidèle). L’intérêt de cette attitude théologique est qu’elle est proche du Protestantisme historique traditionnel qui, comme le souligne Jean –Luc, « pose un non savoir sur le sort » des autres différents. Les murji’a (ceux qui adhèrent à la théorie de l’irjâ’) reconnaissent et assument le « nuage de la méconnaissance » qu’évoque Anne Balenghien. Pour eux, la foi (imân) est une adhésion intérieure à l’exception des œuvres. Ainsi vers la fin du 1er siècle de l’Hégire, ils ont soutenu le combat pour l’égalité mené par les non-Arabes convertis (dans le Khorasan oriental et en Transoxiane) pour qu’ils soient exemptés –en leur qualité de Musulmans- de payer la jizia (impôt que paient les non-Musulmanns). Sur le plan doctrinal, ils se fondaient sur la thèse murji’ite selon laquelle le statut de croyant dépend de la seule profession de foi, à l’exception de toutes les œuvres, telles que l’accomplissement des obligations rituelles et juridiques de l’Islam (Voir Encyclopédie de l’Islam, 2ème édition française, vol, 7, p. 605).
La théorie de l’irjâ’ a eu un grand impact sur l’islam médiéval et explique, par certains aspects, la facilité avec laquelle il s’est propagé loin de ses territoires arabes de départ. Plus encore, elle influença durablement l’ash’arisme (doctrine dominante dans chez les sunnites) : la majorité des sunnites a fini par identifier la foi (‘imân) comme une croyance en Dieu (tasdiq), tout en accordant aux œuvres une position subsidiaire. C’est exactement le contraire qui se passe en ce moment avec le fondamentalisme islamiste qui accorde aux rites une importance plus grande que la foi.
A propos des deux premiers niveaux de nos identités, dans notre relation à Dieu (texte Anne Balenghien).
‘iyal allah (tous enfants de Dieu ) exprime bien ce 1er niveau de l’identité = identité filiale exposé dans le texte d’ Anne Balenghien. Il s’agit d’une expression utilisée dans l’un des hadith du Prophète : « « Tous les hommes sont des enfants de Dieu. Le plus proche parmi vous à Dieu, c’est celui qui prend soin de ses enfants ». Voici le texte arabe du Hadith : « الناس كلهم عيال الله وأقربكم إلى الله أنفعكم لعياله ». A noter que le terme ‘iyal signifie les enfants (hommes et femmes).
L’idée d’une Religion originelle au fondement des religions instituées qui en seraient les manifestations multiples et contingentes (qui correspondrait au 2ème niveau d’adhésion) est présente dans la tradition musulmane de deux manières : une ancienne et l’autre récente.
La première forme de présence de la notion de religion originelle, nous la trouvons chez les mystiques musulmans. Elle fut exprimée de manière éclatante par Ibn Arabi dans son recueil de poésie intitulé « Turjuman al-achwaq » [4] :
« Mon cœur est devenu capable de toutes les formes
Une prairie pour les gazelles, un couvent pour les moines,
Un temple pour les idoles, la ka’ba du pèlerin
Les Tables de la Thora, le Livre du Coran.
Je professe la religion de l’Amour, et quelque direction
Que prenne sa monture, l’Amour est ma Religion et ma Foi ».
Un autre mystique, Rumi, utilisa la parabole de l’éléphant dans une maison obscure où un groupe d’Indous l’avaient amené pour l’exhiber. Ils laissèrent les visiteurs entrer un par un dans l’obscurité [5] :
« Etant donné qu’on ne pouvait le voir avec les yeux, chacun le tâtait dans le noir avec la paume de la main. La main de l’un se posa sur sa trompe ; il dit : « cette créature est comme un tuyau d’eau ». La main d’un autre toucha son oreille : elle lui apparut semblable à un éventail. Un autre, ayant saisi sa jambe, déclara : « Je trouve que la forme de l’éléphant est celle d’un pilier. » Un autre posa la main sur son dos et dit : « En vérité, cet éléphant est comme un trône » De même, chaque fois que quelqu’un entendait une description de l’éléphant, il la comprenait d’après la partie qu’il avait touchée. Selon l’endroit vu, leurs affirmations différaient ; un homme l’appelait Dal, un autre Alif. (….) L’œil de la perception sensorielle est seulement comme la paume de la main : la paume n’était pas en mesure d’atteindre la totalité. (…) Nous nous heurtons les uns contre les autres, comme les barques ; nos yeux sont aveuglés, bien que nous nous trouvions dans l’eau claire. O toi qui t’es endormi dans le bateau du corps, tu as vu l’eau : contemple l’Eau de l’eau. L’eau a une Eau qui la pousse, l’esprit a un Esprit qui l’appelle ».
Cette parabole platonicienne des visiteurs de l’éléphant dans l’obscurité fait référence au pluralisme confessionnel qui exprime la multiplicité des voies (imparfaites) vers Dieu (le Vrai = al-Haq). Il y aurait ainsi, selon la tradition soufie, une religion originelle celle de l’amour de Dieu dont les différentes religions institutionnelles ne sont qu’un vague souvenir (une réminiscence au sens platonicien) ou des constructions institutionnelles conjoncturelles (marquées profondément par les conditions historiques, culturelles et humaines de leur avènement et développement).
La deuxième forme de l’idée d’une religion originelle, est présente dans le travail du penseur musulman Mahmud Mohamed Taha (voire l’article d’Etienne Renaud, Prologues, n° 10, 1997). Dans son ouvrage « La seconde mission de l’Islam », Mahmoud Taha propose une lecture originale du Coran en suggérant de revenir au premier message (le Coran mekkois) dont l’universalisme abroge (il utilise là un concept des sciences coraniques), selon lui, le second message médinois qui est beaucoup plus marqué par la contingence historique. Cette intuition forte qui a coûté la vie à Mahmoud Taha, reste une des pistes intellectuelles et spirituelles les plus riches de la théologie islamique contemporaine.
L’islam des origines et les rapports aux autres
Des historiens sérieux – comme Maurice Lombard [6] ou Marshall G. Hodgson [7] nous ont montré que dans le cas de l’islam et jusqu’à une époque tardive, la composante musulmane, même en Arabie, était démographiquement minoritaire. La rapidité de la conquête arabe était telle que cela a eu des conséquences profondes dont notamment :
Chaque peuple conquis prolonge le mouvement initial : les Iraniens poussent le mouvement vers l’Asie centrale, les Syro-Egyptiens vers l’Afrique du Nord, les Berbères d’Afrique du Nord vers l’Espagne, la Cécile et plus tard vers l’Afrique de l’ouest.
« Ces envahisseurs, arabes et non-arabes, ne constitueront jamais qu’une minorité en pays occupé. Leur rôle dans l’histoire a été de constituer un vaste domaine religieux et politique, d’unir en un grand Empire de vastes territoires disparates et des peuples divers, puis de s’évanouir, de se fondre dans les vieilles populations qu’ils ont soumises… » (Lombard, p. 8) ou encore « L’élément arabe s’est limité ici à une seule vague d’envahisseurs (…) Ici une poignée de conquérants s’absorbe rapidement, se fond dans des foules urbaines de civilisations supérieures… » (Lombard, p. 10)
« L’imposition des seuls non-Musulmans fut ainsi un des aspects économiques de la conquête, jusqu’à ce que le califat, menacé de perdre, par le jeu des conversions, une matière imposable de plus en plus importante, institue un impôt foncier commun aux Musulmans et aux non-Musulmans » (Ibid. 10)
« La conquête ne s’est pas traduite par des destructions (…) Donc pas de désorganisation : les populations soumises fournirent tout naturellement les cadres de l’administration, l’outillage mental de peuples cultivés. Les nouveaux convertis chrétiens, juifs ou persans, ces mawalis (clients) comme on les appelle alors, vont jouer un rôle décisif dans l’élaboration de cette civilisation syncrétique « musulmane ». Même dans la codification de la grammaire arabe, même dans l’établissement du texte définitif du Coran… » (Ibid. 10- 11)
Lombard va jusqu’à soutenir l’opposé de la thèse de H. Pirenne [8] : « C’est pensons-nous, écrit-il, grâce à la conquête musulmane que l’Occident a repris contact avec les civilisations orientales et, à travers elles, les grands mouvements mondiaux de commerce et de culture (…) la création du nouvel Empire islamique entraina, pour ce même Occident, un étonnant développement. Si les invasions germaniques ont précipité le déclin de l’Occident, les invasions musulmanes ont provoqué la relance de sa civilisation » (Ibid. 11)
- [1]Voir : La Déclaration universelle des Droits de l’Homme : 40è anniversaire, Paris : Unesco – l’Harmattan, 1990, p. 51↩
- [2]Siratat mustaqima, trad. Par Ahmed al-Qabanji, Beyrouth, Arab Diffusion Company, 2009.↩
- [3]L’édition iranienne est parue en 1996. Il a été traduit après en langue arabe.↩
- [4]Pour plus d’informations sur les circonstances de composition de ce recueil à la Mekke, voire Ibn Arabi ou la quête su Soufre Rouge, de Claude Addas publié chez Gallimard, Coll. Bibliothèque des Sciences Humaines, 1989, p. 250 – 255.↩
- [5]Jalal Din Rumi, Mathnawî, III, 1270 s.↩
- [6]Voir L’islam dans sa première grandeur : VIII-XI è siècles, Flammarion, 1971↩
- [7]The Venture of Islam : Conscience and History in World Civilization, (3 vol.), The University of Chicago Press, 1974↩
- [8]Cf. H. Pirenne, Mahomet et Charlemagne, 4è éd. Paris-Bruxelles, 1937↩